"VMF a traversé des moments très difficiles pendant la crise et lors de la restructuration. Afin de préserver et pérenniser notre outil de production, nous avons en effet réorganisé notre structure. Le passage d’une manufacture artisanale à une manufacture industrielle a nécessité l’application de nouvelles orientations stratégiques. Ainsi nous avons repositionné notre offre aux besoins du marché en revoyant nos processus-clés et notre modèle d’affaires", explique Florian Serex, directeur général de Vaucher Manufacture Fleurier. Un terme a été mis au chômage partiel, avec 5 mois d’avance sur le calendrier, et VMF emploie aujourd’hui 160 collaborateurs. Optimiste, Florian Serex ajoute "nous sommes préparés pour une croissance de 100% en 5 ans."
Un ensemble verticalisé
Vaucher Manufacture Fleurier, qui appartient à la Fondation de Famille Sandoz et qui a grandi aux côtés de Parmigiani, dont c’était le pôle manufacturier, avait effectivement gravement ressenti la récession horlogère qui a suivi la crise économique des années 2008 - 2009. Après avoir recruté 60 nouveaux collaborateurs en 2008, Vaucher dut se séparer de 14 personnes dès mars 2009, puis passer au chômage partiel à 70% avant de devoir à nouveau réduire son effectif en avril 2010, passant alors de 210 personnes aux 160 d’aujourd’hui. Mais depuis, non seulement le vent a-t-il commencé à tourner (revenant bien plus lentement regonfler les voiles des ateliers et des branches annexes que celles des marques, dont les stocks n’attendaient que ça) mais, comme l’explique Florian Serex, la crise, pour douloureuse qu’elle ait été, a aussi permis de revoir profondément la stratégie. Il s’agissait en effet de faire tourner un ensemble important, à présent presque entièrement verticalisé (car, aux côtés de VMF, il faut compter les sociétés soeurs, dans le mouvement avec Atokalpa / Elwin et dans l’habillement, avec Les Artisans Boîtiers / Quadrance & Habillage, qui font cadrans et boîtiers).
On reprochait jusqu’à présent à Vaucher Manufacture sa faible ouverture au marché extérieur (principalement auprès d’Hermès, qui détient 25% de VMF), l’inadéquation relative de son offre et ses prix jugés trop élevés. La nouvelle stratégie mise en place par Florian Serex tient largement compte de ces remarques. Ainsi, VMF propose-t-elle à présent une offre largement remaniée, composée de six calibres mécaniques dont deux nouveaux calibres dits “de base”, dont l’industrialisation a été poussée et qui peuvent donc être proposés à des prix plus “abordables”. De quoi séduire de nouvelles marques.
Le 5300, un micro-rotor
Le premier d’entre eux est un mouvement de base, le Calibre 5300, un heure, minute, petite seconde et date extra-plat (2.6mm pour un diamètre d’encagage de 30mm), à remontage automatique par micro-rotor (42 h de réserve de marche). Ce choix du micro-rotor, outre qu’il prédispose à la minceur du mouvement, a également l’avantage d’offrir de larges surfaces de ponts, toujours visibles, qui permettent une personnalisation poussée de la décoration. Car c’est là un des axes où VMF veut mener son offensive: offrir des mouvements facilement personnalisables, y compris quant à la forme des ponts et du rotor. Doté de belles finitions (perlages, Côtes de Genève, roulements à billes céramique, anglages, pivots roulés, etc...), positionné pour aller équiper des montres commercialisées aux alentours des 8’000.-CHF, le Cal. 5300 est destiné à être produit dans des quantités de 50 à 200 pièces par série. Son prix s’établit en moyenne à 1190.- CHF pour une série-type de 500 pièces. La possibilité est aussi offerte de lui adjoindre une plaque additionnelle qui le transforme en un Quantième Perpétuel de moins de 4mm d’épaisseur (avis aux amateurs!).
Le 3000, un automatique double barillet
Le second nouveau mouvement est le Calibre 3000, un automatique proposé en 10 ½“’ ou en 11 ½”’, disposant de deux barillets en série, battant à 28’800 A/h (4Hz) et proposant une autonomie de 50 heures. Le VMF 3000 est la forme industrialisée du précédent VMF 4000, le mouvement automatique de prestige de la manufacture conçu pour recevoir des modules additionnels internes (QP rétrograde ou Quantième Annuel, phases de lune) ou externes (chronographe, GMT, etc...). Ce nouveau calibre sera disponible en séries allant de 500 à 5000 pièces par année. Il est commercialisé au prix de 890.- CHF.
CALIBRE 5300, CALIBRE 3000 |
Un poids transformé en atout?
Fort de cette nouvelle offre largement ouverte aux horlogers, VMF projette de pouvoir passer des 12’000 mouvements réalisés actuellement par an à 25’000 mouvements d’ici les 3 à 4 ans. Tout dépendra pour y parvenir des politiques qui seront menées par la concurrence directe. On pense notamment à Frédéric Piguet, avec ses quelques 70’000 mouvements par an, ou à Sowind, attachée à Girard-Perregaux qui pourrait également s’ouvrir plus largement à la concurrence. Différence de poids, néanmoins, que rappelle Florian Serex, VMF fait partie d’un ensemble qui, rappelons-le, est non seulement presque intégralement verticalisé mais qui, surtout, produit son propre oscillateur et son propre échappement. La lente et longue constitution de cet ensemble industriel, s’il a lourdement pesé jusqu’à aujourd’hui, risque fort bien de se transformer en sérieux avantage dans les années tendues à venir. A condition que l’offre de VMF rencontre l’adhésion des horlogers. Affaire à suivre.
Modules additionnels internes : Quantième Perpétuel , QP Annuel rétrograde |
Source: Europa Star Première Vol.13, No 4